Janette Bertrand
Janette Bertrand naît à Montréal en mars 1925, au sein d’une famille de quatre enfants dont le père est un commerçant prospère. Elle peut donc étudier à sa guise, ce qui l’amène à la faculté des Lettres de l’Université de Montréal. Étudiante, elle fait la rencontre d’un jeune homme bien sous tous les rapports, Jean Lajeunesse, qui, pour payer ses études, joue à la scène et à la radio. Mais à 20 ans, le malheur frappe : la jeune femme est atteinte de la tuberculose. Un an durant, elle est confinée dans un sanatorium des Laurentides, loin des siens, où elle met à profit ses longues heures d’inactivité pour se plonger dans la lecture des grands auteurs. Elle en sort guérie, passablement lettrée et désireuse de prendre la plume.
Elle rêve d’être grand reporter mais à cette époque, les quelques journalistes de son sexe sont confinées aux pages féminines des publications du temps. Elle aboutit dans un hebdomadaire à grand tirage, Le Petit Journal, où elle signe des billets au ton plutôt féministe et teinté d’humour. On lui propose bientôt une rubrique importante, le courrier du cœur. Elle accepte de relever le défi mais le fait à sa façon, en ne craignant pas d’aborder, 17 ans durant, des sujets jugés osés, tels l’avortement ou l’homosexualité.
À l’instigation de Jean Lajeunesse, qu’elle a épousé en 1947, elle tâte de la radio, d’abord à Radio-Canada puis à CKAC où elle anime l’émission à succès Mon mari et nous.
À l’instigation de Jean Lajeunesse, qu’elle a épousé en 1947, elle tâte de la radio, d’abord à Radio-Canada puis à CKAC où elle anime l’émission à succès Mon mari et nous.
Elle fréquente aussi, aux côtés de son mari, les milieux du théâtre et, en 1952, décroche un petit rôle dans la production d’Aurore l’enfant martyre, le grand succès cinématographique de l’époque. Tout au long de ces années d’hyperactivité, elle trouve le temps de donner naissance à cinq enfants dont des jumeaux mort-nés. Deux ans après le lancement de notre télévision, en 1954, elle y fait son apparition. Jusqu’en 1960, elle partage avec son mari la vedette de Toi et moi, dont elle écrit les textes, une comédie de situation de 15 minutes qui pourrait bien être l’ancêtre d’Un gars, une fille.
Au tournant des années 1960, elle et son mari passent à Télé-Métropole où ils animent des années durant un quiz et un talk-show fort suivis tout en n’abandonnant pas la radio de CKAC où ils animent ensemble des émissions de cuisine ou de conseils pratiques, teintés d’humour et de bon sens, qui gagnent la faveur du public. Peu à peu, Janette Bertrand impose le modèle d’une femme qui, sans pousser jusqu’au féminisme, s’est émancipée et a conquis sa liberté d’action. Bref, Janette est devenue l’égale de Jean.
Dans ces années 1960, tout est remis en question, la société québécoise se redéfinit, les rôles familiaux se réorganisent autrement. Janette Bertrand rend compte de ces phénomènes et propose une règle de conduite, dans un téléroman énormément populaire et qui fait date, Quelle famille! que diffuse Radio-Canada. Elle y met en scène le couple Tremblay, incarné par elle-même et son mari, qui a cinq enfants et un chien, Macaire. Dans ce feuilleton familial, chaque problème trouve sa solution dans l’humour, la franchise, et surtout, le dialogue. Six ans durant, de 1969 à 1974, Quelle famille! fait fureur. Elle remet ça en 1976. Cette fois, elle ne joue pas, elle laisse ça à Jean Lajeunesse qui incarne le rôle-titre du téléroman Grand-papa. Elle y traite davantage de sujets tabous et d’avant-garde et fracasse des records d’écoute, dépassant parfois les deux millions et demi de téléspectateurs ! Après la dernière saison de Grand-papa, elle s’attaque au théâtre et fait jouer coup sur coup deux pièces, Moi, Tarzan, toi Jane puis Dis-moi le, si j’dérange dans lesquelles elle traite des stéréotypes, des relations de couple et de la condition des femmes sans verser dans le féminisme dont elle se défend bien.
En 1982, Janette Bertrand entame une très fructueuse collaboration de plus de 15 ans avec Radio-Québec où elle anime d’abord des talk-shows très courus comme S.O.S. J’écoute et Parler pour parler où elle aborde, à sa manière unique, tous les sujets de l’heure –phénomènes de société, préoccupations de femmes et de mères, relations hommes-femmes, etc. Puis, à compter de 1985, dans le cadre de la série Avec un grand A, toujours prolifique, elle écrit une cinquantaine de dramatiques dans lesquelles elle traite de sujets parfois controversés, souvent difficiles mais toujours d’actualité.
À compter du milieu des années 1990, Janette Bertrand se fait plus rare à la télévision. Les modes et le monde ont changé… mais pas elle, qui a encore bien des choses à dire… Elle partage d’ailleurs sa vaste expérience et son savoir-faire à l’Institut national de l’image et du son, où elle enseigne. Au tournant des années 2000, elle publie son autobiographie et se lance dans une nouvelle aventure, l’écriture de romans.