Michel Bélanger
Michel Bélanger, né à Lévis, en septembre 1929, connaît une enfance puis une jeunesse sans histoire entre une mère et une sœur car son père, journaliste de son état, est décédé alors qu’il n’avait que sept ans. Ses études classiques terminées, il s’inscrit en Économie à l’École des sciences sociales du Père Lévesque, à l’Université Laval, où il fait la connaissance d’une consoeur qu’il mariera éventuellement et qui lui donnera six enfants.
À sa sortie de Laval, il obtient une bourse qui lui permet de parfaire ses connaissances à l’Université McGill, à Montréal, puis il prend la direction d’Ottawa où l’accueille le ministère fédéral des Finances. Il y demeure sept ans et s’y fait une solide réputation.
À l’été 1960, René Lévesque, qui a hérité du ministère des Ressources hydrauliques, veut s’entourer d’une équipe tournée vers l’avenir. Le Père Lévesque lui recommande d’approcher l’économiste Michel Bélanger qui se trouve justement à Québec, en vacances. Lévesque est déjà un héros pour la jeunesse de l’époque -et pour le fonctionnaire fédéral qui, à 30 ans et des poussières, n’hésite pas : il ne retournera pas à Ottawa. Michel Bélanger devient tout de suite l’homme de confiance du jeune ministre. Ce dernier pressent la pertinence de la nationalisation de l’électricité, l’autre la rendra possible. Sous-ministre adjoint, Michel Bélanger joue un rôle-clé dans l’opération qui va faire d’Hydro-Québec non seulement un pourvoyeur efficace d’électricité mais aussi un déclencheur de l’essor économique de la province et de la promotion des francophones.
À la suite du départ de l’équipe libérale de Jean Lesage, en 1966, Michel Bélanger est nommé sous-ministre de l’Industrie et du Commerce, puis conseiller économique du Conseil exécutif. En 1971, il devient le fonctionnaire numéro un du Québec en tant que secrétaire du Conseil du Trésor. Tout au long de ces années, il participe à la création des principaux leviers dont l’État québécois se dote pour faire face à un monde en mutation. Tous les grands dossiers économiques de l’époque portent sa marque : SOQUIP, SOQUEM, SGF, SIDBEC et la SDI, même la Caisse de dépôt et la Régie des rentes. Ses avis sont si précieux que, pendant ses 13 ans dans la fonction publique québécoise, il aura conseillé quatre Premiers ministres, de Lesage à Bourassa, en passant par Johnson et Bertrand.
En 1973, il quitte la fonction publique pour prendre la direction de la Bourse de Montréal, le premier francophone à occuper ce poste de façon permanente. Il insuffle une nouvelle vigueur à cette vénérable institution puis, un peu plus de deux ans plus tard, il accepte la présidence de la Banque provinciale. Il orchestre alors la fusion de celle-ci avec la Banque canadienne nationale. À l’automne 1980, le voilà à la tête de la sixième banque en importance au Canada, dont l’actif dépasse les 15 milliards. Il est désormais un homme de premier plan lorsqu’il est question d’économie et de gros sous. D’autant plus qu’il est aussi, avec ses 14 000 employés, le quatrième plus important patron de la province. Le développement économique du Québec passe désormais, entre autres grands décideurs, par Michel Bélanger.
Parvenu à l’âge de 60 ans, il estime avoir droit à un repos bien mérité. Il démissionne de la présidence de la Banque nationale mais continue de siéger sur les conseils d’administration de diverses grandes entreprises. Quelques mois après après avoir pris ses distances des affaires, le Premier ministre Bourassa lui propose un nouveau défi, celui de coprésider la Commission mise sur pied pour dégager une position constitutionnelle revue et corrigée à la suite de l’échec de l’Accord du Lac Meech.
Si la Commission Bélanger-Campeau, qui compte plus de 30 membres d’horizons très divers, peut mener à terme ses délibérations, elle le doit en grande partie à l’arbitrage, à la fois modéré et ferme, de Michel Bélanger dont le public fait enfin la connaissance. En 1992, quand le gouvernement conservateur de Brian Mulroney propose les accords de Charlottetown aux Canadiens, lors d’un référendum, Michel Bélanger fait campagne pour le OUI. Trois ans plus tard, lors de la campagne référendaire de 1995, rassurant, sûr de lui mais modeste, à la fois indubitablement nationaliste et fermement convaincu que le Québec peut mieux s’épanouir à l’intérieur du Canada, il préside le comité organisateur du camp du NON.
Peu de temps après, il apprend qu’il a un cancer. Vaincu par la maladie, il s’éteint le premier décembre 1997, à l’âge de 69 ans. Le lendemain, l’Assemblée nationale adopte à l’unanimité une motion rendant hommage à la mémoire de Michel Bélanger, décrit par les uns et les autres comme un des grands bâtisseurs du Québec moderne