COMMENT DEVENIR UN ARTISAN DE PAIX
Nous allons parler ce soir, de la manière dont nous pouvons devenir un artisan de Paix, un bâtisseur d’un monde nouveau, et nous le ferons dans cette perspective qu’est la tradition spirituelle occidentale, la tradition judéo-chrétienne.
Nous allons essayer de voir, quel éclairage peut apporter la spiritualité à cette question fondamentale.
En fait, la première question que l’on peut se poser ce soir, est la suivante :
De quelle Paix parlons-nous ?
Suffit-il de dire non à la guerre ? Est-ce à ce niveau que se situent nos exigences, nos espérances de Paix ?
Jean-Paul II a souvent, au cours de son pontificat, répété une phrase qui m’a beaucoup marqué. Il a dit et redit « La Paix du cœur, est au cœur de la Paix ».
Et c’est à partir de cette phrase que nous allons explorer cette question : comment devenir un artisan de Paix.
« La Paix du cœur, est au cœur de la Paix », c’est une affirmation d’une profondeur incroyable, elle situe bien où se trouvent les racines d’une Paix réelle de toute Paix véritable, c’est-à-dire, au plus profond du cœur au plus profond de l’être, au centre même de chaque individu, et c’est cela qui a mon sens est cet éclairage que peut apporter la spiritualité contemporaine, à cette grande question : comment peut on devenir un artisan de Paix en se situant au cœur de l’homme, en se situant dans le cœur de l’homme.
Et je rajouterai une autre affirmation de Jean-Paul II lors de son passage en Israël, il a affirmé «Que seul Dieu donne la Paix », et il me semble que cela aussi, c’est encore une affirmation fondamentale :
La Paix serait un don du ciel que l’homme l’accueillerait davantage qu’il ne pourrait l’acquérir. Cela me parait pouvoir nous orienter sur une réflexion profonde à propos de la Paix.
Comment la Paix est effectivement donnée ? Comment la Paix descend en l’homme ?
Cela ne signifie pas que l’homme n’ait pas un travail à faire bien au contraire, et d’abord un travail sur soi. Le travail fondamental pour être un artisan de Paix, ne se situe pas dans un premier temps au niveau d’une intervention politique ou au niveau d’une action sociale, mais au niveau d’un travail intérieur, une préparation intérieure à recevoir ce don de la Paix, à recevoir cette puissance de la Paix qui vient incontestablement d’en haut, à condition que l’homme ait fait le travail nécessaire.
Accueillir cette force de Paix qui descend d’en haut, pour être un canal, à condition de faire d’abord ce travail sur soi pour être en résonance avec cette réalité.
Avant de vouloir construire un monde de Paix, il y a déjà tout un long cheminement à faire, sur le chemin de la sérénité, qui est en fait, le chemin du combat spirituel, combat qu’il faut mener contre celui qui nous rend imperméable à cette énergie de Paix, à ce souffle de l’esprit.
Lutter contre ces tendances que nous avons au repliement sur soi, à cet isolement qui fait en sorte que l’homme s’enferme, se coupe de la réalité des autres. C’est extrêmement important de se libérer de cette tendance presque naturelle, à résister à cette tendance, à tout ce qui fait de moi, un être qui n’est plus en mesure de recevoir, d’accueillir ce don de Paix qui vient d’en haut.
Il y a une triple tentation : celle de l’avoir, du pouvoir et celle du valoir qui sont les 3 grandes revendications de l’ego, et il y a la nécessité d’œuvrer, de mener ce combat, cette guerre sainte pour préserver le cœur, pour éviter qu’on s’enlise dans une dynamique qui est contradictoire avec toute expérience de Paix.
J’ai parlé de Dieu. C’est un mot qui peut fâcher, très sérieusement. Il faut entendre le mot AMOUR. « Dieu n’est qu’amour », nous dit St Jean. Cela est extrêmement important. Quand on a compris cela, on peut aborder la réalité de Dieu sous un angle tout à fait nouveau, tout à fait différent. Je pense honnêtement que certaines personnes qui se disent athées, sont plus croyantes, sont plus tournées vers Dieu, que certains pratiquants qui ne vivent pas de façon concrète ce qu’ils pensent être leur Foi.
Ce qui est important : c’est de se tourner vers cette réalité de Dieu, qui est en fait la réalité de l’amour.
Quand je dis que la Paix est un don de Dieu, je ne veux pas dire que c’est un homme barbu sur un nuage, que l’on peut prier en lui disant « Envoie nous la Paix » Arrête la Guerre. On sait que ça ne se passe pas comme ça, et que Dieu ne se permet pas d’intervenir comme ça et de contraindre d’un côté où de l’autre des individus pleinement libres, à ne pas agir dans la direction qu’ils ont choisie. Si l’on pense que prier pour la Paix dans ce sens là, peut apporter quelque chose, on fait erreur. C’est pas du tout à ce niveau là que ça se passe, mais effectivement si je vous dis que la Paix est un don de Dieu, c’est que la Paix est un don de l’amour, et l’amour, n’est pas un concept abstrait, ce n’est pas une réalité désincarnée.
C’est quelques chose que l’on a à vivre, à incarner, c’est quelque chose que l’on a à exprimer, dans la mesure où l’on apprend à aimer, dans la mesure où l’on ouvre ce cœur, et qu’on en fait un sanctuaire sacré où il y a cette puissance de l’amour où Dieu habite au plus profond de soi, la Paix est possible, mais il faut savoir que cela n’est réalisable, que dans la mesure où concrètement on est tourné vers, où concrètement on chérit cette réalité.
C’est important de comprendre dans quelle mesure, en mettant l’amour au centre de sa vie, parce que le cœur c’est l’organe, le cœur c’est le centre de l’homme, et quand on dit que la Paix est liée au cœur, elle est liée à sa réalité la plus profonde, la plus intime, la plus fondamentale de l’homme, la question est :
Qu’est-ce qui habite le centre de mon être ?
Qu’est-ce qui vit au plus profond de moi ?
C’est ça la grande question, et si l’on est capable de répondre qu’effectivement c’est l’amour, au fond de moi-même, alors là, à n’en point douter, je suis un artisan de Paix, là je peux construire un monde nouveau, aussi utopique et insensé que ça puisse paraître, tout est possible.
Comment se mettre dans cette dynamique de l’artisan de Paix ?
La Paix dans l’univers biblique, et judéo-chrétien est très associée au repos de l’homme et elle n’est possible que si je me relie, si je me rattache à l’être complet, à l’être achevé, je pourrais dire, si je deviens complet, si je deviens achevé.
La problématique de la Paix est beaucoup plus complexe et beaucoup plus subtile et beaucoup plus vaste, que la simple question de militer en faveur d’une non agression, d’un non état de guerre et qu’il y a derrière la problématique de la Paix, des questions extrêmement fondamentales quant au développent de l’homme.
La Paix n’est possible que si on se lie, si on se rattache à cet état d’être achevé, que lorsqu’on sera complet, et jusque là, il y aura impossibilité de trouver une authentique Paix.
La notion d’être achevé comporte certains pièges.
L’un de ces pièges, c’est le culte de la perfection, qu’on connaît aujourd’hui, on parle de développement personnel, il faut pouvoir atteindre la perfection.
« Soyez parfait comme votre père céleste est parfait », c’est devenu l’adage de beaucoup de groupes de croissance personnelle.
L’homme aujourd’hui est confronté à un impératif « Sois heureux et sois parfait.
Mais en bas de cela, il y a insatisfaction : tu n’es pas arrivé au but ».
Alors être parfait : c’est être soi, c’est découvrir ce que l’on est vraiment et l’assumer pleinement.
L’homme n’est pas invité à devenir autre chose que ce qu’il est, il est invité à découvrir ce qu’il porte au plus profond de lui-même, il est invité à découvrir ses limites et à les assumer, à y trouver une occasion de valorisation.
Le problème de l’homme, c’est qu’il a au plus profond de son être, une aspiration à la transcendance, parce que l’Eternel a soufflé dans ses narines.
Mes limites loin de m’enfermer, loin de m’aliéner, me donnent d’exister.
Comment puis-je connaître la transcendance ?
La clef fondamentale : c’est l’amour qui me permet de participer à la réalité de l’autre tout en demeurant moi-même.
En prenant soin de l’autre, en exaltant ce qu’il est.
Le premier moment de l’amour c’est de permettre à l’autre d’exister.
A chaque instant, Dieu me donne d’exister, « il retire de lui–même en lui-même » pour me donner l’espace afin que j’existe.
Il me donne d’exister différent de lui.
Les kabbalistes prennent une très belle image : celle de la femme qui va se retirer d’elle-même en elle-même pour permettre à l’enfant qui est un autre, qui est un étranger en elle, de permettre de se développer.
C’est un acte d’effacement et c’est le premier moment de l’amour, s’effacer, se retirer, pour permettre à l’autre d’exister.
C’est vrai du premier instant de l’univers, de la création, mais c’est vrai aussi dans chacune de nos vies, à chaque instant.
Aimer quelqu’un, c’est lui donner d’abord d’exister différent de nous, et ça, c’est pas facile, parce qu’on a plutôt tendance à se projeter on a plutôt tendance à se prendre pour la référence.
On se dit « tiens celui-là il est intelligent, il pense comme moi ».
On dit qu’on aime l’autre, et dans cet amour, on veut le façonner pour qu’il soit comme nous, on ne supporte pas que l’autre soit différent de nous, car s’il est différent de moi et que moi je suis bon.
Celui là, il n’est pas bon. Alors que ce premier moment de l’amour va me permettre de dire « je te donne d’exister, je suis prêt à m’effacer, pour te laisser exister, et non seulement cela, et je veux te chérir, je veux contribuer à ton développement, à ta croissance, c’est la participation amoureuse à la vie de l’autre.
Tout en demeurant moi-même, je fais l’expérience de l’autre.
L’autre nous apprend des choses, que l’on ne pourrait pas connaître autrement que dans notre relation avec cette personne différente.
On dépasse nos limites, et l’on fait une expérience de l’ordre de la transcendance.
Comment voulez vous aller ver un monde de Paix ?
Si déjà on est prisonnier d’un certain activisme, pour ne pas trouver notre vie bien vide.
On est dans la précipitation qui est un signe de haine par rapport à soi même qui nous amène tout droit vers la guerre, vers la division, vers l’opposition, parce que déjà, on n’a pas la Paix dans son cœur.
Déjà, si on ne s’est pas pleinement valorisé, si on ne s’est pas un peu chéri soi-même, si on ne s’accepte pas tel que l’on est, avec ses limites, ses qualités et ses défauts, si on n’est pas en Paix avec soi, comment voulez-vous, que l’on soit artisan de Paix, que l’on construise un monde de Paix.
On peut faire toutes manifestations du monde, aller dans toutes les églises pour prier pour la Paix, ça n’a pas de sens, parce que cette réalité elle n’est pas en nous, et si elle n’est pas en nous, nous ne sommes pas canal pour que cette force qui est surnaturelle, qui vient d’en haut, puisse descendre et donc s’incarner et se manifester.
Dieu n’est pas un interventionniste ce n’est pas le genre à s’imposer. Dieu est amour et respecte jusqu’à l’extrême la liberté de chacun.
Alors avec St François disons : « Fais de moi, un artisan de Paix », ça veut dire, transforme moi de l’intérieur, fait de moi un porteur de cette puissance de l’amour, fais que je ne sois qu’amour.
Ca implique que je pose des gestes, que je passe à l’action, que je reconnaisse la différence des autres autour de moi et que je la valorise.
La recherche de la Paix, passe par les chemins de la sérénité, c’est la quête de l’insouciance.
Se libérer du souci. L’homme est souci, et c’est pour cela qu’il doit apprendre à se libérer de cet esprit de souci, pour se placer dans une disposition propre à la confiance.
Dans l’évangile de Matthieu, il y a une invitation insistante « Ne vous inquiétez pas pour votre vie, de ce que vous mangerez, ni pour votre corps de quoi vous le vêtirez. La vie n’est pas plus que la nourriture et le corps plus que le vêtement. Qui d’entre vous, en l’inquiétant tant peut ajouter une seule coudée à la longueur de sa vie? »
Etre accaparé par l’inquiétude, c’est un gros problème sur le chemin de la Paix.
C’est la nécessité de lâcher prise, par rapport à cette attitude soucieuse, qui est une attitude inquiète et qui fait en sorte que l’on veut contrôler, que l’on veut maîtriser les choses.
On a l’impression aujourd’hui, qu’un artisan de paix, c’est celui qui va façonner la paix, je ne pense pas.
On a à faire un certain travail d’ouverture, on a à se placer dans cette attitude qui nous met en résonance avec la puissance de l’amour, la paix est un don.
Elle s’accomplit de façon mystérieuse, ce qui est en dehors de notre maîtrise et de notre contrôle. On a l’impression qu’on façonne son destin, ou son existence, qu’on maîtrise la situation, et pourtant, toutes les choses essentielles, on ne les maîtrise pas, d’autant plus que ce sont des dons qui nous sont faits.
La vie, l’existence, on ne la maîtrise pas, le souffle peut nous être retiré à chaque instant, sans qu’on exerce aucune maîtrise, aucun contrôle.
Ne pas violenter la vie, c’est d’être en Paix avec la vie, c’est d’être en Paix avec ce qui est.
Ne pas chercher à faire de ce qui est, autre chose que ce qui est.
Sinon c’est déclarer la guerre à la vie, déclarer la guerre à l’ordre des choses.
C’est vouloir comme un conquérant, façonner la vie comme moi je l’entends.
Le lâcher prise est un acte de Foi merveilleux.
Oui à la Vie. Oui j’accepte la vie, j’accepte ce qui se présente à moi. J’accepte de le vivre pleinement intensément, d’en chercher le sens profond, d’accueillir la réalité et non pas d’être en tension, d’être en guerre, en opposition avec la réalité, parce que si c’est vrai du dedans de moi, si je suis en tension avec moi-même, je ne peux pas être un artisan de Paix et je suis en tension avec la vie, je ne peux pas l’être non plus.
Ca ne veut pas dire de tout accepter, de tout admettre, d’être passif.
Mais ça veut dire d’être accueillant par rapport à ce qui se présente, la vie nous invite à des choses prodigieuses.
La vie met sur notre chemin des syncronicités extraordinaires, des espèces de coïncidences qui nous invitent à prendre une certaine direction, mais souvent, on ne l’a pas écoutée, on ne s’est pas préoccupé de cette réalité, et en conséquence on ne l’a même pas vue.
Etre un artisan de Paix, c’est d’abord s’ouvrir à cette force de l’amour, à cette aspiration, à la transcendance mais qui ne va dans le sens d’acquérir, de s’approprier ce que sont, ou ce qu’ont les autres, mais en y participant dans le respect et l’exaltation de cette différence, c’est donc s’ouvrir à ce que les chrétiens appellent « l’Esprit Saint », l’oiseau, la colombe associés curieusement à la Paix.
L’Esprit Saint, est l’esprit de chérissement, c’est ce qui me permets de chérir, de prendre soin de l’autre.
L’esprit saint ou Paraclet est celui qui souvent prend soin de moi et un artisan de Paix, est celui qui prend soin du beau, du vrai, qui prend le temps dans son quotidien de prendre soin du bien, de celui qui est devant soi « Ce que vous avez fait, au plus petit d’entre les miens, c’est à Moi que vous l’avez fait ».
On nous demande, de voir autour de nous, ceux qui ont besoin. Il y a des gens qui sont dans le maquis de la vie, qui sont là, perdus. Il y a toujours autour de nous des gens qui ont besoin, mais on ne les a pas vus parce qu’on était replié sur soi.
Quant on dit prendre soin de l’être, ce n’est pas faire brûler de l’encens, se mettre avec une Mudra spéciale, et puis ronronner une voyelle, ce n’est pas le souci de l’autre.
Il n’y a qu’une seule chose fondamentale et essentielle : c’est de servir, et servir, c’est prendre soin de l’autre, et d’abord prendre conscience que cette personne existe.
Ce n’est pas volontairement qu’on ne voit pas les gens « on flotte », on n’est pas vigilant, on n’est pas à l’attention, à l’écoute de ceux qui nous entourent.
Qu’est-ce qu’on va retenir de l’exposé de cette conférence ?
Est-ce qu’il y a cette écoute, cette vigilance qui fait que l’on perçoit quelque chose de sublime, quelque chose de transcendant.
Un très beau passage du Coran dit : « Partout où vous regardez, là, se trouve le visage de Dieu ». C’est quelque chose d’extraordinaire de prendre conscience de cela.
Servir Dieu, c’est servir les gens qui sont tout proches, être à l’écoute de ce qui nous entoure, être présent à la vie.
Prendre conscience de ce qu’il y a au plus profond de soi.
Autrefois, on appelait cela « le sacrement de l’instant présent » Etre présent ne serait-ce qu’un instant à ce qui nous entoure, être à l’écoute. Ressentir cette réalité qui nous environne, et en prendre soin, çà veut dire aussi la garder.
Etre gardien de son cœur.
Si « La paix du cœur, est cœur de la Paix », ça veut dire qu’il y a une grande exigence pour construire un monde de paix.
Sois le gardien de ton cœur,
Et n’y laisse entrer aucune pensée sans l’interroger »
Demande à chacune d’entre elles : es-tu des nôtres, es-tu une adversaire ?
Ces pensées, ces sentiments, sont des nôtres quand ils apportent un accroissement de ce sentiment de Paix.
Ils sont ennemis lorsqu’ils développent la colère, des tensions à l’intérieur.
Socrate enseignait le principe des 3 tamis :
Quand un ami voulait lui dire « tu ne sais pas ce que ton ami a fait ?
Socrate lui disait : Attend, as-tu passé ce que tu vas me dire à travers les trois tamis ?
1. Est-ce que ce que tu vas me dire est vrai ?
2. Est-ce que ce que tu vas me dire est bien ?
3. Est-ce que ce que tu vas me dire est utile ?
Si ce n’est ni vrai, ni bien, ni utile, je te conseille de ne pas m’en parler, et de vite l’oublier.
Ca c’est quelque chose de fabuleux.
Ce n’est pas seulement 1 des 3 tamis, mais les trois, qu’il faut passer avant de sortir de la bouche.
Rester silencieux, ce n’est pas plus mal.
Trouver un espace en soi, pour que l’Esprit Saint y descende. Etre vigilant, gardien du cœur. Ne pas laisser entrer n’importe quoi, ça c’est une ascèse, qui préserve le cœur qui en fait un espace.
Vous n’aurez pas dans votre vie, une seule journée où vous n’aurez pas à appliquer cela, c’est une réalité concrète.
L’ennemi de la Paix, c’est l’activisme, la précipitation.
C’est le harcèlement à la perfection. Tout cela contribue au développement du stress, d’une certaine haine de soi et des autres, qui finalement nous éloignent considérablement de la Paix.
Comment vaincre cet activisme ? Comment vaincre cette tendance que l’on a, à vouloir vivre notre aspiration par une accumulation et par une acquisition de choses : par le jeun.
Notre manque n’est pas un manque du côté de « l’avoir » mais du côté de « l’être» et qu’est-ce que l’on fait ?
On colmate le manque d’être en mangeant. On mange pour oublier, on mange pour compenser des manques affectifs.
Les aliments sont des illusions, qui ne comblent pas, ce à quoi on aspire. Le sentiment que l’on a que notre vie n’est pas bien pleine, n’est pas parfaite, qu’il y a un vide en soi, nous amène à acquérir des choses.
La voie du désencombrement, consiste à se détacher de tous ces objets, de toutes ces choses que l’on acquiert et qui sont en réalité des compensations à ce manque.
En les accumulant, on oublie notre vrai désir, notre véritable aspiration à la transcendance.
Renoncer à tous ces biens, comme jeûner aux aliments matériels, se limiter, n’est pas seulement la marque d’un moi fort, mais contribue à le renforcer.
Pourquoi ? Parce qu’en renonçant à tout ce que les autres possèdent je découvre plus ce qu’est ma propre identité.
La guerre d’agression, c’est généralement pour acquérir ce que les autres possèdent, et ça m’empêche de prendre conscience de ce que je suis vraiment.
Que je n’ai plus besoin de tout cela, augmente le sentiment que j’ai de moi-même, me recentre sur moi-même.
Je ne suis plus absorbé par les objets que j’ai accumulés pour compenser les manques que j’avais en moi.
Jeûner pour la paix. Avoir la force de se détacher de tout ce qu’on a accumulé, de tout ce que l’on a saisi, de tout ce que l’on s’est approprié pour colmater notre manque.
S’en détacher, développe la force intérieure en moi et je me recentre.
A l’inverse, il y a aussi le développement qualitatif. Après un repas, nous constatons que nous n’avons rien goûté. Manque de vigilance, manque d’attention.
Accentuer, intensifier la qualité de notre goût, déguster dans une expérience profonde, la qualité de la vie, la qualité de mes expériences relationnelles.
Les mangeurs compulsifs sont des gens qui ne goûtent pas, ils sont uniquement dans le quantitatif, en mettre davantage, c’est le problème des conquérants.
La guerre sainte, c’est augmenter et exalter la volonté que ça donne une dimension à l’existence nouvelle.
Instaurer un nouvel ordre des choses. Développer en nous, un esprit de chérissement de l’autre, pour faire triompher cette expérience de l’amour.
S’il est vrai, que la paix est un don, il faut se préparer à recevoir ce don. « Dieu donne la Paix » a rappelé Jean-Paul II en Israël. On dit parfois, qu’il est plus difficile de recevoir que de donner.
Dans quelle mesure je peux la recevoir ?
Dans quelle mesure je peux l’accueillir ?
Et si dans mon concret de chaque jour, je n’arrive pas à poser les gestes d’un artisan de Paix, comment voulez-vous que je reçoive cette force, si je ne suis pas en accord, si je ne suis pas ouvert à cette réalité ?
La Paix ne va pas forcer les murs ? La Paix ne va pas entrer de force dans mon cœur, s’il n’est pas ouvert, s’il n’est pas en résonance avec cette réalité, elle ne me touchera pas, elle pourrait descendre du ciel à chaque instant, et à mon avis, si elle le fait, ça ne changera rien.
Si on reprend chacun des éléments de cette réflexion, il y a des clefs qui nous amènent à remettre en question certains modes d’existence, c’est ça finalement qui compte, c’est ça que la démarche spirituelle peut apporter, comme mobilisation à cette démarche pour la Paix.